Aller au contenu
Les Forums de MeteoBelgique
cumulonimbus

Il y a 125 ans...

Messages recommandés

L’année 1888, avec sa moyenne de 7,5°C, est la deuxième année la plus froide de la série d’Uccle-Bruxelles, mais elle est certainement la championne des intempéries de toute nature. En plus, comme vous allez le voir, elle présente pas mal de similitudes avec l’année 2013, tout au moins jusqu’à présent.

Le 1er janvier annonce déjà la couleur : à Uccle, avec un ciel presque serein (quelques cirrus), un sol enneigé et un vent piquant de sud-est, la température descend en deçà des –13°C. Ailleurs dans le pays, il fait plus froid encore, avec –17°C à Maaseik (alt. 35 m) et –18°C à Arlon (alt. 442 m).

Ce 1er janvier 1888 restera ensoleillé et froid tout au long de la journée, mais par la suite, le temps change rapidement en devenant particulièrement désagréable. Le dégel intervient dès le lendemain, avec de petites pluies ou bruines et des températures de 3 à 7°C en journée. Du 6 au 13, la brume et le brouillard sont presque permanents, avec stratus et bruines fréquentes, et une absence complète de soleil, le tout par un petit vent de sud à ouest. Cette grisaille tenace, d’ailleurs, concerne la totalité du pays.

L’anticyclone, d’abord situé sur le Golfe de Gascogne et la France, remonte ensuite nettement vers le nord et place notre pays, dès le 13, sous des courants froids de nord-est. Il fait beau. Puis, après un retour temporaire d’un temps un peu plus doux, mais humide et sombre, le froid revient en force à la fin du mois, avec des températures qui deviennent extrêmes le 31 janvier. À Uccle, le minimum s’effondre jusqu’à –15°C (malgré l’absence de neige au sol). À Verviers (255 m), la température descend jusqu’à –19°C tandis qu’on note –25°C à Bastogne (504 m) et à Ville-du-Bois (près de Vielsalm, 400 m). Dans cette dernière localité, des couches de neige de 50 à 60 cm ont été observées dans le courant de ce mois de janvier.

Février est à nouveau un mois fort froid, avec la poursuite des températures extrêmes les 2 premiers jours, avec même –26°C à Ville-du-Bois (400 m) et –24°C à Bastogne (504 m). Mais même l’ouest du pays est concerné par des températures extrêmes, avec –18°C à Maldegem (environ 15 km à l’est de Bruges) et –17°C à Zomergem (une dizaine de kilomètres au nord-ouest de Gand). À Uccle, on observe –15°C le 2, puis la température redescend presque aussi bas le 25. Là, le froid est sans neige au début du mois, mais dès le 16, le sol est entièrement couvert de neige et le restera pendant un bon bout de temps. Dans certaines régions, notamment à l’est du pays, ce mois de février restera dans les annales pour la fréquence des chutes de neige.

Le mois de mars est une prolongation pure et dure de l’hiver. À Uccle, le sol restera entièrement (ou presque) enneigé jusqu’au 6 mars au matin, tandis que le minimum descend en dessous des –10°C le 1er du mois. Malgré le beau temps de ce premier jour, le maximum ne parvient pas à dépasser le 0°C. Les jours d’après, le temps devient plus variable avec quelques chutes de neige.

Après un faux printemps vers le milieu du mois, doux mais humide et pluvieux, le froid et la neige reviennent en force dès le 18. Et quel froid ! Les 18, 19 et 20, les maxima ne dépassent guère les –3 à –4°C à Uccle, sous un vent mordant de nord-est les 18 et 19, un ciel couvert et une fine neige, continue et parfois abondante le 19. L’épaisseur de la neige au sol, en plaine, se situe entre 5 et 10 cm en plaine et entre 10 et 25 cm en Haute Belgique. La fin du mois du mois est à nouveau plus douce, mais déjà marquée par les orages, qui prennent un caractère violent dans la région de Liège le 28.

Le mois d’avril redevient froid du 1 au 13, avec de très fréquentes gelées nocturnes (jusqu’à –8°C à la Baraque Michel) et des maxima particulièrement bas, voisins de 4°C le 5 et le 9 à Uccle. Les chutes de neige sont encore fréquentes, mais ne donnent un enneigement, à Uccle, que le 10 au matin. Après le 13, le temps devient plus doux, mais souvent perturbé avec passages pluvieux. Le 15 est la seule belle journée, avec soleil, cumulus et altocumulus et 19°C. Un autre faux printemps.

Le mois de mai ne se défend pas trop mal, avec une température moyenne et une insolation à peu près normales, mais il y a de nombreux retours de manivelle, avec un vent fréquemment orienté au nord. Le 26 notamment est une journée pénible, avec une température qui reste coincée à 9°C, un vent désagréable de nord à nord-ouest et un ciel désespérément couvert de stratocumulus.

Le mois de juin est l’antichambre d’un été parfaitement pourri. Pourtant le début est prometteur : temps ensoleillé et rapidement doux, voire chaud avec 27°C le 3 à Uccle. Mais le mois, dans son ensemble, ne comptabilisera que 147 heures de soleil, avec un total de 100,5 mm de précipitations. Les températures tantôt fraîches, tantôt assez chaudes enclencheront un mois de juin particulièrement orageux. Ces orages sont souvent accompagnés de précipitations très intenses, notamment au Barrage de la Gileppe, à la Baraque Michel, à Spa et à Stavelot. Le tonnerre est souvent entendu, on compte 14 jours d’orage dans les régions de Charleroi, d’Enghien et entre Bruges et Gand. Dans le reste du pays, ce nombre tourne souvent autour de 10, un véritable record pour les observateurs de l’époque.

Juillet est encore bien pire. L’insolation totale, à Uccle, ne comporte qu’une centaine d’heures. Seul juillet 2000 connaîtra une insolation encore plus basse. Les précipitations, quant à elles, atteignent 186,9 mm, un quasi-record aussi (196,5 mm en 1942). Et avec une moyenne de température de 13,9°C, juillet 1888 appartient aux mois de juillets les plus froids de l’histoire.

Le er juillet déjà, le soleil ne daigne se montrer que 10 minutes, et la température n’atteint que 11 à 12°C en après-midi. Mais ce n’est encore rien en comparaison de ce qui se passera 10 jours plus tard. Là, sous un ciel très nuageux à couvert et des pluies abondantes, la température chute brutalement en début/milieu d’après-midi, passant de 11°C (ce qui est déjà très peu) à 5°C ! Cette chute des températures, avec des valeurs extrêmement basses pour une journée de juillet, est attestée partout dans le pays. À Furnes, on note 7°C, à Arlon, 6°C et à la Baraque Michel, 1°C !!!

Des flocons de neige se sont mêlés aux fortes averses dans la région de Chimay, tandis que des chutes de neige seront observées à plusieurs reprises à la Baraque Michel le lendemain, et même à des altitudes plus basses comme à Dison, Vielsalm et Spa. Les Hautes-Fagnes, dans la région de la Baraque de Fraiture, connaîtront même un enneigement temporaire de 2 cm environ. C’est le seul cas attesté d’un enneigement en Belgique au mois de juillet.

Le reste du mois n’a guère été plus encourageant. La plus haute température du mois, notée à Uccle le 25, n’a été que de 22°C. Et cette journée un peu belle, avec cumulus et altocumulus, s’est vite terminée en orage, une heure et demie d’activité orageuse le soir.

Les cumuls de précipitations, sur les mois de juin et juillet, sont par ailleurs très remarquables. À Uccle, ce total atteint 287,4 mm, tandis qu’ils se situent entre 300 et 400 mm en bien des endroits de l’Ardenne, et même au-dessus de 400 mm dans les Hautes Fagnes.

Le mois d’août commence en trombe. Et c’est le cas de le dire. Le 1er août, une tornade est observée dans les environs du Mont Kemmel, et elle a été immortalisée par le dessinateur amateur M. C. Vestibule, greffier à la justice de paix de son vrai métier.

tornademessines18880801.jpg

Dessin : M. C. Vestibule, 1888

L’ensemble de ce mois d’août, d’ailleurs, a été peu ensoleillé et presque aussi froid que juillet. En dehors de la tornade en question, les orages ont été nombreux durant ce mois d’août, principalement au centre du pays. Ces orages se sont souvent produits par temps froid, comme le 15 août par exemple, où ils ont éclaté dans une ambiance particulièrement sombre et une température de 12°C seulement en début d’après-midi. Quelques jours plus tôt, le 12, alors que le temps a été un peu plus clément en journée, les orages ont été particulièrement électriques en soirée (sans doute de type MCS), avec parfois de la grêle. Notons enfin, pour terminer la description de ce mois d’août, que 3 trombes marines ont été observées le 31 dans les environs d’Ostende et du Coq.

Septembre a enfin été plus ensoleillé, mais toujours trop froid pour la saison. En raison de la prédominance des vents de nord à nord-est, le mois a aussi été sec, mais cela a été quelque peu rattrapé par l’abondance des précipitations du 29. Le lendemain, le 30, a été fort froid, avec toujours de la pluie, tandis que quelques flocons de neige auraient été vus en Flandre Occidentale, au Brabant et dans les Hautes-Fagnes.

Octobre, à nouveau, a été très froid. Carlsbourg (396 m) a connu 10 jours de gelée avec un minimum de –5°C. À Bastogne (504 m), on a noté 12 jours de gelée, et 13 à Ville-du-Bois (400 m) et à la Baraque Michel (670 m). Le minimum absolu, dans toutes ces stations, a tourné autour des –4 à –5°C. En Campine aussi, des valeurs proches de –4°C ont été observées.

À nouveau, des flocons de neige auraient été vus à Bruges (le 5) et à Anvers (le 7). À la fin du mois cependant, le temps a été très doux, avec des valeurs de 18 à 19°C à Uccle les 27 et 28, avec un temps assez beau (cirrus et altocumulus + (le 28) cumulus). Ceci marquera un revirement fondamental dans les conditions atmosphériques et la fin du froid et des intempéries de 1888. Les mois de novembre et décembre seront assez doux et ne présenteront plus de phénomènes spectaculaires. La période du 3 au 8 décembre sera même un véritable petit printemps, avec du beau temps (sauf le 5, plus nuageux) et des températures de 8 à 10°C le jour.

Pour ceux qui se souviennent bien des 5 premiers mois de 2013 et du début du 6e mois, les similitudes avec 1888 sont frappantes, même si les dates ne concordent pas exactement. Est-ce un mauvais présage pour cet été-ci ? Nul ne sait encore le dire.

Sources :

- Annales de l’Observatoire Royal, année 1888

- Revues « Ciel et Terre », année 1888, rubrique « Revues climatologiques mensuelles et annuelles »

Modifié par cumulonimbus

Partager ce message


Lien à poster
Partager sur d’autres sites

Tout bonnement incroyable!!!

2 cm de neige en Juillet???? :blink: :blink: :blink:

Partager ce message


Lien à poster
Partager sur d’autres sites

Je déteste les concordances inutiles (sur de trop courts laps de temps) mais là, sur une aussi longue durée, il y a de quoi être interpelé.

Cet été ne démarre toujours pas et vu que le potentiel coup de chaud de la semaine prochaine va se muer probablement en... coup de frais, il y a fort à parier que nous entrions en juillet totalement dénués de vraies journées estivales.

Cela commence à sentir sérieusement mauvais pour les amateurs de chaleur estivale.

Partager ce message


Lien à poster
Partager sur d’autres sites
Je déteste les concordances inutiles (sur de trop courts laps de temps) mais là, sur une aussi longue durée, il y a de quoi être interpelé.

Cet été ne démarre toujours pas et vu que le potentiel coup de chaud de la semaine prochaine va se muer probablement en... coup de frais, il y a fort à parier que nous entrions en juillet totalement dénués de vraies journées estivales.

Cela commence à sentir sérieusement mauvais pour les amateurs de chaleur estivale.

Il y a quand même quelque chose qui m'échappe en météo...

Pourquoi, sur base du temps d'un mois de Juin et des derniers mois on en arrive à émettre des hypothèses sur l'ensemble de l'été?

Ce n'est pas contre toi Océanic, mais j'ai souvent observé ça dans les forums et ça m'interpelle...

Une récurrence peut subitement cesser non? En quoi le temps actuel interférerait sur celui d'Aout? Il ne pourrait pas se mettre subitement à faire très bon en Juillet? Une nouvelle récurrence pourrait se mettre en place?

Partager ce message


Lien à poster
Partager sur d’autres sites

Quelle qualité dans le travail de recherche.

Au même titre que Marco, je trouve que la comparaison est vraiment étonnante.

Maintenant, je ne suis du genre à penser que la statistique conditionne la météo pour l'avenir.

Il y a bien une recrudescence ces derniers temps de goutte froide et autres dépressions d'altitude qui nous influence très mal, mais je pense qu'il s'agit plutôt d'un manque de bol qui s'inscrit dans la logique d'un Jet faible et ondulant (merci le RC?).

Il est dommage qu'on ne sache pas vraiment savoir quel était l'état du Jet en 1888 pour vraiment bien comparer jusqu'au bout a quelle point ces 2 années peuvent se ressembler.

Modifié par huymétéo

Partager ce message


Lien à poster
Partager sur d’autres sites

J'ai eu l'occasion de m'exprimer à ce sujet sur d'autres plate-formes : nous ne sommes plus en 1888, mais en 2013, et les schémas de circulation générale de l'atmosphère ne sont plus les mêmes, surtout depuis le record de banquise de septembre. Donc, cela ne veut rien dire, même si j'admets fort bien que les similitudes sont étonnantes ...

Partager ce message


Lien à poster
Partager sur d’autres sites
J'ai eu l'occasion de m'exprimer à ce sujet sur d'autres plate-formes : nous ne sommes plus en 1888, mais en 2013, et les schémas de circulation générale de l'atmosphère ne sont plus les mêmes, surtout depuis le record de banquise de septembre. Donc, cela ne veut rien dire, même si j'admets fort bien que les similitudes sont étonnantes ...

Il est évident que 2013 ne pourrait être, au maximum, qu'une version "miniature" de ce fameux 1888. Ce qui est déjà pas mal vu, justement, les modifications profondes survenues ces dernières décennies.

Partager ce message


Lien à poster
Partager sur d’autres sites

Créer un compte ou se connecter pour commenter

Vous devez être membre afin de pouvoir déposer un commentaire

Créer un compte

Créez un compte sur notre communauté. C’est facile !

Créer un nouveau compte

Se connecter

Vous avez déjà un compte ? Connectez-vous ici.

Connectez-vous maintenant

×