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Orages - Principes et dynamique des systèmes convectifs

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Annexe A : Électrisation des nuages orageux

Car au final, c'est bien ça qui caractérise un orage. Comme c'est un annexe cela sera assez court.

Nos amis les cumulonimbus électrisés sont des nuages qui n'ont pas le temps pour eux. Si pressés de gonfler et de se développer pour rétablir un déséquilibre énergétique vertical, ils perturbent momentanément l'équilibre électrique local de l'atmosphère. Heureusement, les éclairs sont là pour éviter que le déséquilibre n'augmente de trop. Du coup, en plus de se taper des cordes, voir des boules de glace dans la tronche, on se tape aussi des décharges électriques géantes à même de faire péter les plombs...

- Causes de l’électrisation des nuages orageux

Un orage est une sorte de condensateur géant avec une partie chargée positivement au sommet, et négativement plus bas. En réponse à cette modification du champ électrique, le sol se charge positivement. Des différences de potentiel électrique sont crées, si elles franchissent le seuil de claquage de l'air ( la valeur du champ disruptif de l'air ), une "étincelle" se forme ; c'est l'éclair.

img4F.jpg

Source : http://guy.chaumeton.pagesperso-orange.fr/...010/1sph07c.htm

Il y'a plusieurs théories sur la formation de zones de charges différentes dans un cumulonimbus, et qui agissent certainement de concert. La plus grosse partie de l'histoire s'explique néanmoins avec le principe de triboélectricité. En effet, lorsqu'un nuage convectif se développe, son sommet va finir par atteindre de hautes altitudes dans les cas optimaux. Une partie du nuage va donc rentrer en phase glace, et c'est là que le spectacle commence. C'est principalement les chocs élastiques entre particules de glace présentant différents degrés de givrage qui chargent le nuage. L'eau surfondue est également importante, en effet c'est elle qui permet de givrer les particules. Un orage contenant de virulents mouvements verticaux et une épaisseur importante en phase glace aura de fortes chances d'être bien électrique.

Ce sont donc les collisions entre les particules glacées qui sont les plus efficaces (entre la neige et le grésil par exemple). Le grésil qui tombe au travers de l'épaisseur du nuage rentre en collision avec les cristaux de glace. Lorsque la température ambiante est très basse, le grésil se charge négativement et les cristaux se chargent positivement. Si la température ambiante est haute, c'est l'inverse (le seuil de transition dépend de la quantité d'eau surfondue notamment). Ce transfert de charge se fait en fait grace à un micro-transfert de masse ( lors du choc, une partie de la glace fond et recongèle en faveur d'une des deux particules ) Ce phénomène est schématisé ci-dessous :

306530ehouai.png

Transfert de masse entre un cristal et un graupel. Avant la collision, le cristal possède des ions en surface. Lors du choc, une partie de la surface fond et une charge négative est transférée du cristal vers le graupel. Le sens de ce transfert dépend des conditions environnementales dont la quantité d'eau surfondue.

La séparation des particules chargées se faisant par gravité, on a donc création d'un dipôle électrique dans le nuage. C'est ce qu'on appel le mécanisme non-inductif.

D'autres processus entrent en jeu à mesure que le cumulonimbus se charge. La création d'un champ électrique dans le nuage par les mécanismes non-inductifs permet aux mécanismes inductifs de prendre place. Ces mécanismes résultent de la polarisation en surface des particules par le champ électrique du nuage. Les gouttes nuageuses qui étaient relativement mises à part peuvent à présent jouer un rôle ; lors des chocs les plus grosses particules se chargent négativement et participent à renforcer la structure électrique du nuage, notamment dans les basses couches de ce dernier.

En pratique, les structures électriques mesurées dans des cas réels sont beaucoup plus complexes, notamment dans la partie du courant descendant des systèmes orageux. Lorsque un tel système s’est formé, l’évolution de celui-ci, l’activité des éclairs, l'advection de charge par les courants internes... sont autant de paramètres qui complexifient sa structure électrique. On peut néanmoins indiquer que sur les pourtours des sommets orageux, une couche écran de charges négatives à tendance à apparaître (les charges positives dans l'enclume repoussent celles en dehors).

823023oua.png

Modèle conceptuel de structures de charges électriques dans et hors de l'ascendance orageuse.

- Illustration avec le modèle méso NH

Ci-dessous, une illustration des processus d’électrisation à l’œuvre lors de la simulation d’une supercellule dans le modèle non-hydrostatique Méso NH. Cette partie sert surtout à visualiser un peu mieux la distribution des interactions en jeu, mais il ne faut pas oublier que ça reste de la simulation et que ce n'est qu'une imitation de la réalité. Cependant, ça reste très utile pour la compréhension qualitative.

308108581.png

Cette image représente, en coupe verticale, le taux d'échange de charges dans le nuage par les processus non-inductifs : a) glace-neige, b ) glace-grésil, c) neige-grésil et d) par les processus inductifs. La ligne orange représente le contour du nuage. L'image suivant montre la charge acquise par les différents type d'hydrométéores lors de ces processus ( en couleurs chaudes : chargées positivement + ; en couleurs froides : chargées négativement - ) :

78228214oa.png

En a) la vapeur d'eau qui est bien trop chargée par rapport à la réalité ( chargement qui peut être expliqué en partie par sublimation de la neige chargée négativement ). Cela s'expliquerait par une mauvaise gestion des ions dans le modèle ( manque de puits d'ions ). En b ) l'eau nuageuse chargée exclusivement par les processus inductifs ( en présence d'un champ électrique ) entre grésil et gouttelettes nuageuses. En c) la pluie, faiblement chargée positivement en raison de la fonte du grésil. En d) la glace primaire est chargée positivement au dessus de l'isotherme -20°C et négativement en dessous, en lien avec les chocs glace primaire-neige. Etant donné que la glace primaire se retrouve essentiellement vers le sommet du nuage, ce n'est pas le processus le plus efficace pour électriser le nuage. En e) la neige et f) le grésil qui sont très chargés et contribuent pour une bonne partie à électriser le nuage. En effet, la zone d'interaction de ces deux hydrométéores se trouvent entre l'isotherme 0°C et le sommet du nuage, et conduit à charger grosso modo la neige de façon négative et le grésil de façon positive. Les processus inductifs tendent également à augmenter la charge positive du grésil à basse altitude.

Lors de cette simulation, les processus d’électrisation ont aboutis à la structure suivante :

513883172.png

C'est un dipôle électrique inversé, une plage de charges positives surmontée d'une plage de charges négatives, qui se rapproche de plus en plus du sol à mesure que l'orage vieillit et correspond bien à la baisse d'altitude du déclenchement des éclairs dans le nuage :

272102943.png

Ce qui est intéressant à souligner également, c'est que lorsque l'on change les conditions initiales afin de se rapprocher au mieux de la réalité, on obtient cette fois ci, pour la même simulation, un tripôle ( structure plus proche du cas réel mesuré ) :

274543644.png

La raison qui fait que dans le premier cas on aboutit à un dipôle inversé au lieu d'un tripôle serait dû au fait que la vitesse d'ascendance était trop faible pour transporter suffisamment d'eau surfondue en altitude et permettre à la glace primaire de se charger positivement. Cette sensibilité existe également dans le monde réel, ce qui peut expliquer la grande variété de structure électrique observée ( dipôle, dipôle inversé etc. ).

Pour aller plus loin : https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-00011490/document

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En complément de la partie 11 sur les forçages à grande échelle et leur rôle dans l'initiation convective, un petit article de Météo-suisse met également en évidence le dilemme du phasage si important entre cette dynamique et l'énergie convective lors de la prévision orageuse :

Pour que des orages supercellulaires ou des lignes de grains très vigoureuses se produisent, non seulement forte instabilité et environnement dynamique sont indispensables, mais il faut en outre que les deux soient en phase, autrement dit, il faut que la zone d'ascendance dynamique se superpose à une surface ou le CAPE est maximal. Le CAPE seul donnera des orages stationnaires à courte durée de vie, l'environnement dynamique seul donnera de fortes précipitations non orageuses.

http://www.meteosuisse.admin.ch/home/actua...e-delicate.html

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